Jeff Richard:
Prax, l'Empire Lunar, et le Taureau Blanc
La présence impériale Lunar en Prax était une menace existentielle pour le mode de vie Praxien - tout comme l'expansion vers l'ouest des colons dans les Grandes Plaines a mis en danger les Indiens des Plaines ou la colonisation des steppes russes a mis en danger les nomades des steppes. Vous pouvez l'édulcorer autant que vous voulez, mais les Bisons et les Impalas ont été en grande partie chassés de Prax vers la Désolation, beaucoup plus hostile, et les Grands Llamas ont perdu leurs bons pâturages dans la Rivière aux Berceaux. Même les Morokanth sont sous pression. Seuls les Monteurs d'Antilope Noire ont prospéré, bien qu'ils soient déchirés par des conflits religieux et sociaux. Et ceci après seulement un peu plus d'une douzaine d'années.
La présence Lunar est en fait une répétition des événements du Second Âge, avec en plus des éléments d'hostilité cultuelle. En fin de compte, Waha, Taureau Tempête et Orlanth sont tous hostiles aux Sept Mères et ennemis de la Déesse Rouge. C'est juste intégré dans les cultes. Les choses sont donc un véritable baril de poudre en Prax.
La Société du Taureau Blanc jette une grenade dans le baril de poudre. C'est un peu comme
la variation Lakota de la Danse des Fantômes. C'est un mouvement millénariste, associé au culte du héros de Jaldon Dent d'Or, et à d'autres cultes en Prax. Le Taureau Blanc est censé unifier les nations praxiennes et les libérer du joug de l'Empire Lunar, amener les esprits et les dieux à combattre en leur nom, et triompher du Chaos - et tout le monde s'attend à ce que les vraies batailles se déroulent dans la Passe du Dragon ou même en Péloria (comme au Premier Âge). L'esprit n'est pas obscur - presque tous les Praxiens le connaissent - mais personne ne s'attendait à ce qu'un esclave étranger soit celui qui le trouve et s'allie avec lui.
Ce qui nous amène au rôle d'Argrath dans tout ça. Il est lié au Taureau Blanc, mais c'est un étranger, et d'une certaine manière, il est aussi lié aux dragons. Comme Arkat avant lui, Argrath embrasse les contradictions et travaille avec ses ennemis pour lutter contre Gbaji (maintenant appelé la Déesse Rouge). On pourrait penser que les Lunars le comprendraient (car à bien des égards, son histoire ressemble à celle de la Déesse Rouge elle-même), mais ils ne le font pas plus que les Nysaloréens ne l'ont fait avec Arkat. Vous pouvez dire que sa guerre est insensée, mais pour moi elle n'est pas différente des guerres de la Déesse Rouge contre l'Empire Carmanien. Peut-être que la Déesse Rouge voit les parallèles, mais ses disciples mortels, eux, ne les voient pas. Du moins, pas encore.
Les Praxiens suivent donc Argrath dans la Passe du Dragon. Ils sont récompensés par de nouvelles prairies, un tribut et une unité qui leur manquait depuis le Premier Âge. Qui sait quelle est la part d'Argrath dans la poussée vers Peloria, et quelle est la part des attentes et des exigences des Praxiens? Après tout, nous avions des Khans Bisons en Sylilla et Vanch même au Troisième Âge, et les Antilopes Noires savent très bien qu'ils ont une branche sur le Plateau de la Faim.
Bien que les Praxiens puissent survivre dans la Désolation, il s'agit d'un environnement rude et bien plus difficile que Prax lui-même. Il est comparable au déplacement des Indiens vers de lugubres réserves ou à l'exode massif des Tatars de Crimée.
La Désolation est mieux que le Pays des Vautours - où la survie est impossible.
Mais la Désolation est comparable à Prax de la même manière que le Grand Bassin est comparable aux prairies semi-arides du Wyoming ou du Colorado.
Prax est un lieu d'abondance comparé à la Désolation de Genert. Et si l'on examine attentivement la Désolation, on constate que la superficie totale de ses prairies n'est pas plus grande que celle de Prax (bien qu'elle fasse environ quatre fois la taille de Prax), et qu'il y a beaucoup moins de prairies disponibles toute l'année. Les prairies sont séparées par de plus grandes étendues de mauvaises terres que celles de Prax. Ajoutez à cela l'influence plus forte des Vents de Cuivre secs, et c'est tout simplement un endroit plus difficile à survivre que Prax.
Bien sûr, c'est mieux que le Pays des Vautours ou les Mauvaises Terres où il est impossible de faire vivre des troupeaux. Mais c'est une terre plus marginale que Prax. Cela est déjà arrivé aux Praxiens auparavant (au Second Âge) et c'était vraiment une période de test. Toutes les tribus qui sont entrées dans la Désolations au Second Âge ne sont pas revenues.
Ainsi, lorsque nous parlons de l'attitude des Praxiens envers l'Empire Lunar, des choses comme le Chaos ou la Chauve-Souris Pourpre ne sont que la cerise sur le gâteau. Forcer les tribus et les troupeaux à quitter leurs pâturages traditionnels et à s'installer sur des terres marginales à travers le Pays des Vautours va être une source constante d'hostilité. Mais cette hostilité permet à de nombreux Praxiens de se plaindre plus facilement du caractère chaotique de l'Empire Lunar.
Les colons sartarites ont fait la même chose, mais à une échelle beaucoup plus petite et avec l'accord des chefs de tribus. Ils ont colonisé le Comté de Pavis, qui était autrefois une prairie bien arrosée. Mais les biens commerciaux et le marché de la viande que Nouvelle Pavis a fourni ont au moins partiellement compensé la perte (même alors, certaines des tribus praxiennes ont essayé de s'emparer de Nouvelle Pavis par la force).
Mais l'occupation Lunar n'a profité qu'à la Tribu des Monteurs d'Antilope Noire.